Prix Nobel d’économie : les ventes aux enchères, un outil politique

Le prix Nobel d’économie a été attribué à Paul Milgrom et Robert Wilson pour leurs travaux sur les systèmes de ventes aux enchères.
Les travaux de ces deux économistes de Stanford traitent depuis le début des années 70 des ventes d’œuvres d’arts, de timbres et de vin qui sont très spéculatifs. Puis elles se sont étendues vers les enchères de marchés car cela régit le quotidien de milliards de personnes sur Terre.

Ces chercheurs ont étudié les effets de levier qui permettent de maximiser le profit d’une enchère, et également les enjeux psychologiques qui s'y trouvent.
Parce qu’elles sont des jeux de rareté organisée, les enchères permettent développer de nouvelles idées sur la compétition et la théorie des jeux. L’idée est bien sûr de maximiser les gains pour les vendeurs et les acheteurs, ce qui veut aussi dire pour un Etat qui veut mettre des concessions en vente, confier les activités dans les mains des meilleures agents.

A l’époque des travaux de Wilson et Milgrom dans les années 80, les économistes se débattent avec les Démons des Enchères : la « malédiction du vainqueur », ou les « offres mutuellement destructrices ». Avec ses « nouveaux formats », le couple Wilson - Miglrom apporte une solution pratique, d’une redoutable complexité théorique et mathématique : puisque l’idée de Milgrom est de jouer sur la conscience qu’ont les acheteurs de l’état du marché.
Les enchères en plus des ventes dites « courantes » que l’on peut retrouver par exemple à Drouot, sont aussi un moyen privilégié pour les pouvoirs publics d’attribuer des marchés aux opérateurs de biens ou services publics : droits de forages off-shore, fournitures d’électricité en gros, "slots" (créneaux horaires) dans les aéroports, quotas de pêche et quotas carbone ; et bien sûr les licences téléphoniques telles que les réseaux 3G, 4G,5G.

En ce qui concerne la 5G, l’Etat avait mis en jeu 11 « blocs » de fréquence à répartir entre les quatre opérateurs : Orange, Bouygues, SFR et Free. C’est là qu’interviennent les innovations de Wilson et Grove qui permettent à l’Etat de fixer ses règles : pas plus de 5 blocs par prétendants, pas plus de 11 blocs au total – sinon c’est la remise en jeu avec un prix qui augmente à chaque tour.

Au bout de 17 tours, Orange qui voulait 5 blocs au départ a fini par baisser ses exigences à 4, les autres opérateurs à 3 et 2 blocs, et l’Etat a fait monter le prix à 126 millions d'euros par bloc, récupérant 700 millions d’euros de plus qu’avec le prix de départ.

De ce point de vue l’objectif est atteint : viser le plus haut prix pour les blocs et le plus de concurrence dans leur exploitation.

Retrouver l’article original rédigé par France Culture et s'appuyant sur une nouvelle du Financial Times ici : https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-de-leco/le-journal-de-leco-du-mardi-13-octobre-2020